Dans le groupe H, les choses sont assez claires. Nous devons absolument battre la Russie - le score n'importe pas - pour passer en huitièmes de finale. C'est peu et c'est énorme. C'est peu parce que les Belges conservent la totale maîtrise de la situation. Ils gagnent, et c'est dans la poche, ils ne gagnent pas, et c'est la valise.

Mais c'est beaucoup parce que cette victoire est devenue un impératif, et un impératif bien périlleux. Eux, les Diables, qui viennent de battre un curieux record, celui de sept matches de phase finale de Coupe du Monde d'affilée sans victoire, se doivent de mettre fin à cette ahurissante série. Et, surtout, de retrouver quelques-unes de leurs valeurs traditionnelles comme la rigueur défensive, la vitesse d'exécution ou l'esprit de corps dont ils ne firent guère état, ce lundi.

Alors bon, on essayera d'être positif, c'est-à-dire d'oublier au plus vite ce spectacle d'Oita qui fut sans doute un des plus faibles matches de compétition des Diables depuis longtemps. On tentera de faire abstraction de tout ce qu'on a vu et, surtout, de ce qu'on n'a pas vu contre la Tunisie, pour chercher ce qu'il y a de plus positif, pour se raccrocher à tout ce qui peut constituer un espoir de victoire, et donc de qualification. Robert Waseige en aura bien besoin car on n'ose imaginer ce que, jusqu'à vendredi, il va devoir endurer comme pression médiatique alors que, pourtant, il a, cette fois, essayé toutes les options qu'on lui proposait.

Reportons-nous un moment à la Coupe du Monde de 1986. C'est important, c'est celle qui vit les Diables atteindre les demi-finales, le sommet de leur carrière. Or le premier tour avait été détestable, et c'est peu dire. Face à trois équipes de seconde, sinon de troisième zone, le Mexique, le Paraguay et l'Irak, les Diables terminèrent à la troisième place. A l'époque, celle-ci pouvait encore être qualificative car il existait des bons et des mauvais troisièmes. Nous eûmes la chance de faire partie des bons troisièmes mais la bronca contre Guy Thys fut d'une violence rare. Heureusement, le sélectionneur réagissait avec une philosophie exceptionnelle à toutes les attaques.

Tout le monde se demanda à quelle sauce notre équipe nationale allait être mangée, en huitième de finale, par une équipe soviétique qui avait bien d'autres lettres de noblesse que les Russes d'aujourd'hui, avec des stars comme Dasaev et Belanov et un entraîneur comme Lobanowski, le mythique Ukrainien qui vient de nous quitter. La suite, vous la connaissez. Leon restera un haut lieu du football belge et la superbe victoire belge, inscrite dans les annales à tout jamais. Bien sûr, comparaison n'est pas raison mais ce rappel n'est pas inutile pour sauvegarder, tant bien que mal, le moral des troupes.

En attendant, le tour décisif commence aujourd'hui. Les têtes vont inexorablement tomber. L'Allemagne qui ne peut pas perdre, la France qui doit gagner, les premières secousses du Mondial, c'est peut-être pour tout de suite...