L’exploit... d’y être
1970
La première des deux aventures mexicaines des Diables Rouges fut de très loin la moins glorieuse. Elle marqua néanmoins un renouveau, dans la mesure où toute une génération de joueurs pourtant hyper-talentueux (Nicolay, Van den Berg, Hanon, Jurion, Stockman, etc. ), qualifiés de champions du monde des matches amicaux (2-1 contre la Hongrie le 30 octobre 1960, 5-1 contre le Brésil le 24 avril 1963, 2-2 à Wembley contre l’Angleterre le 21 octobre 1954) échoua dans trois éliminatoires successives contre la France (1958), la Suisse et la Suède (1962) et la Bulgarie du regretté Asparoukhov (1966).
Une quatrième élimination consécutive paraissait inévitable dans un Groupe 6 comprenant l’Espagne et la Yougoslavie, deux géants du football européen.
Raymond Goethals qui venait d’entrer en fonction, n’était pas encore considéré comme un sorcier, surtout pas après le premier match en Finlande, où l’aventure faillit se terminer avant même d’avoir commencé, Johan Devrindt (85e) et Odilon Polleunis (89e) réussissant in-extremis à renverser une situation terriblement compromise. Mais la suite fut royale: 6-1 au retour (à Waregem), 3-0 contre la Yougoslavie au Parc Astrid, 1-1 en Espagne à 10 contre 11 après l’exclusion injustifiée de Pierre Hanon, et enfin 2-1 (2 x Johan Devrindt) dans la boue de Sclessin, transformé en chaudron, le 23 février 1969. Le dernier match - premier de Christian Piot - à Skopje (4-0 pour la Yougoslavie) fut joué pour du beurre.
L’expédition mexicaine tourna cependant à la catastrophe (seuls les Standardmen Nico Dewalque et Wilfried Van Moer tirèrent leur épingle du jeu) à cause d’une mauvaise entente entre Brugeois et Anderlechtois, dont les nerfs étaient à vif au terme d’un stage préliminaire interminable sous la canicule.
Les débuts furent pourtant honnêtes: 3-0 contre le Salvador, mais les Soviétiques - qui ne prévoyaient sûrement pas la revanche de 1986 - se chargèrent de ramener tout le monde sur terre: 4-1.
Raymond Goethals assura alors qu’il se passerait inévitablement quelque chose de scabreux contre le Mexique, pays organisateur. Et ce fut effectivement le fameux penalty imaginaire de Jeck sifflé par l’arbitre argentin Coerezza dès la... 2e minute.
L’échec laissa des traces, Paul Van Himst et Wilfried Puis annonçant au retour qu’ils déclineraient désormais toute sélection. Le genre de comportement que Popol, devenu sélectionneur national, jugeait inadmissible vingt ans plus tard... mais lui aussi considéra plus tard qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent jamais d’avis.
Le coup de gueule de Popol
Comme la plupart des Diables présents au Mexique en cette année 70, Paul Van Himst ne disputa pas une grande phase finale. Mais l’Anderlechtois s’y fit remarquer. Si, en 86, notre équipe nationale revint du Mexique sous les acclamations d’un peuple en délire, il en fut tout autrement en 1970. Popol fut le plus visé: on l’accusait d’avoir saboté Lambert, symbolisant à l’extrême la rivalité qui opposait les Anderlechtois et les Brugeois.
Après, dans les stades, le Bruxellois entendit souvent résonner Mexico dans ses oreilles. Le 21 septembre, suite à un différend qui l’avait opposé à un dirigeant de l’Union belge, Van Himst annonça à Raymond Goethals son retrait de l’équipe nationale. Deux rencontres plus tard, le Soulier d’Or du siècle retrouvait la tunique des Diables et, contre l’Ecosse, inscrivit trois buts. Pour beaucoup, Van Himst est le meilleur footballeur belge de tous les temps.